UE : en juillet l’inflation a touché plus durement les pays où le niveau de vie est plus bas

Europe

L’inflation est à son plus haut niveau au sein de la zone euro et de l’UE depuis plus de 20 ans. Elle a atteint près de 10% au sein de l’UE au mois de juillet. Les trois pays Baltes sont les Etats membres les plus grevés par l’inflation : l’Estonie a dépassé les 23%, la Lettonie et la Lituanie étant respectivement juste au-dessus et en dessous des 21%. Ce sont, pour le reste, principalement les pays de l’Est de l’Europe qui souffrent de la forte hausse des prix.

A l’autre bout du spectre, la France et Malte s’en tirent le mieux avec « seulement » 6,8% d’inflation en juillet. Malte n’a notamment toujours pas relevé les prix de l’énergie réglementés par l’Etat, maintenant ainsi artificiellement l’inflation à zéro dans ce domaine.

Comparés avec le niveau de vie, les chiffres de l’inflation montrent qu’elle est globalement plus forte dans les pays où la vie est moins chère que la moyenne de l’Union européenne. Quatorze pays où la vie est moins chère ont des taux d’inflation supérieurs à celui de l’UE (9,8%) contre seulement deux Etats membres (Belgique et Pays-Bas), où le taux d’inflation et les niveaux de prix sont supérieurs à ceux de l’UE. Dans les pays plus chers, l’inflation moyenne est montée à un peu plus de 9% en juillet contre 14% pour les pays où la vie est moins chère.

En moyenne dans l’UE, les habitants perdent 25% de leurs revenus entre 64 et 75 ans, lors du passage à la retraite. En Bulgarie, ces revenus sont presque divisés par deux. Par ailleurs, dans les tous les Etats membres, les hommes gagnent plus que les femmes. En moyenne, le salaire médian des hommes est supérieur de 4% au salaire médian des femmes tous âges confondus. Ainsi, les Européennes retraitées sont celles qui touchent les revenus les plus bas.

Or, l’inflation est globalement assez forte dans les pays où les femmes touchent moins, les rendant particulièrement vulnérables à la hausse des prix. En Lituanie, troisième pire taux d’inflation en juillet avec une variation annuelle de 20,9% par rapport à juillet 2021, les revenus des femmes de plus de 75 ans étaient en 2020 de 961 euros plus faibles que ceux des hommes du même âge alors qu’aucune pension de vieillesse minimale n’est proposée par l’Etat. Ce sont elles qui ont les plus bas revenus toutes catégories d’âge et de sexe confondues dans le pays, touchant près de 39% de moins que les femmes de 50 à 64 ans.

Les transferts sociaux font assez peu baisser le risque de pauvreté dans le pays par rapport au reste de l’UE. Avec près de 30% de risques en moins, la Lituanie pointait à la 19ème place de ce critère au sein de l’UE en 2020-2021 ; l’inflation haute y fragilise donc encore plus les personnes les plus pauvres.

En majorité les mesures de correction font baisser le risque de pauvreté dans les pays où l’inflation est moins importante. Dans les pays où la vie est moins chère, le taux moyen de réduction du risque de pauvreté par transferts sociaux est de 31.6% contre 42.3% pour les pays les plus chers.

En Estonie et Lettonie, le salaire minimum accuse un écart assez marqué avec le salaire médian (365 € et 236 €), même si la différence est moins forte qu’au Luxembourg (840€) ou à Malte (561€), mais les récipiendaires doivent y faire face à un taux d’inflation bien plus important ; le taux d’inflation de l’Estonie et de la Lettonie était supérieur à 20% en juillet contre 9,3% et 6,8% pour le Luxembourg et Malte.

Les six pays (Autriche, Chypre, Danemark, Finlande, Italie et Suède) ne proposant pas de salaire minimum permettant aux travailleurs les moins bien payés de faire face à l’augmentation des prix ont des taux d’inflation proches de la moyenne de l’UE (entre 8.3% et 10.6%). Chypre se distingue dans ce groupe par les difficultés rencontrées par les habitants pour chauffer leur logement. Ce pays du Sud est, en effet et de manière contre intuitive, le pays où ce critère était le plus haut en 2021.

Or, à part en Hongrie où la régulation étatique des prix de l’énergie fait que l’inflation est pour le moment principalement due à l’augmentation des prix de l’alimentation au cours de cet été, l’énergie est le principal carburant de la flambée des prix dans le reste de l’Union.

Dans le cas de Chypre où les produits pétroliers représentent près de 60% de la consommation finale énergétique du pays, les combustibles liquides, dont le fioul domestique, est le poste où l’inflation a été la plus forte cet été avec un taux de variation annuelle de +80% en juillet. Si ces chiffres n’expliquent pas les causes, ils montrent les difficultés auxquelles sont exposés les Chypriotes les plus pauvres face à l’augmentation des prix de la source principale de chauffage de l’île. Ainsi, alors que les premières mesures du gouvernement visaient à réduire les factures d’électricité, le 28 juillet l’exécutif chypriote a annoncé qu’il absorbera la hausse des factures d’énergie des foyers à compter de l’automne. La protection sera totale pour les foyers les plus pauvres et sera échelonnée entre 50% et 85% pour les autres, visant à couvrir un demi-million de foyers.

En Estonie et en Lituanie, la situation ne fait que perdurer depuis l’année dernière. En 2021, les deux pays se trouvaient déjà dans le quatuor de tête de l’inflation derrière la Pologne et la Hongrie. Et l’énergie était déjà le poste qui augmentait le plus. En Estonie, le prix du gaz a commencé à flamber à partir de la seconde moitié de l’année pour atteindre un taux d’inflation de près de 260% en juillet de cette année. Le gaz ne représentait en 2020 que 8% de la consommation finale du pays mais Eurostat l’a estimé la même année dépendant à 80% du gaz russe. En juillet le prix du gaz naturel s’établissait 4 € de plus que la moyenne européenne en Estonie à un peu plus de 18 € du kWh.

L’institut Bruegel a calculé que les pays de l’Union européenne avaient déjà consacré 236 milliards d’euros de septembre 2021 à août 2022 en mesures correctives ponctuelles pour aider à faire face à l’inflation énergétique (hors Portugal et Hongrie), avec des mesures comme des chèques énergie, ristournes à la pompe…

Rapportés au PIB, ce sont la Grèce et la Lituanie qui font les plus gros efforts financiers, avec respectivement 3,7% et 3,6% de leur PIB dépensés en aides. Les deux pays réservent certaines de ces aides aux foyers les plus pauvres. En Lituanie, des mesures visent tout particulièrement les personnes âgées dont on a vu qu’elles étaient particulièrement vulnérables ou les salariés touchant le salaire minimum.

L’Estonie, 23,2% d’inflation en juillet, ne consacre que 0,8% de son PIB à ces aides selon les calculs de l’institut Bruegel mais concentre ses efforts sur les foyers aux plus bas revenus. Selon le ministre de l’Administration publique, Jaak Aab, cette mesure bénéficiera à 380 000 foyers estoniens, dont les foyers de retraités qui sont ceux qui perdent le plus en revenus entre 64 et 75 ans et plus dans l’UE (-42% de baisse du revenu médian en 2020).

La situation risque encore de bouger dans chaque Etat membre au cours de l’automne et de l’hiver avec la mise en place progressive de mesures d’aide selon les pays et l’augmentation de la demande en chauffage. Et ce d’autant que, sans véritable surprise, l’inflation continue de s’accroître dans la zone euro selon les premières estimations passant de 8,9% au mois de juillet à 9,1% en août. Paolo Gentiloni, commissaire européen à l’économie, a expliqué sur Euronews, qu’en tout état de cause, ce qui est précisément demandé des Etats membres « c’est que [leur] réaction soit, dans la mesure du possible, temporaire et ciblée, c’est-à-dire qu’elle soit destinée aux ménages qui ont le plus de difficultés à payer leurs factures d’essence, de chauffage ou d’électricité. Et il s’agit des familles à faibles revenus. »

 

 

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